Soirée match ? Ou pas.

code by Silver Lungs

Comme depuis plusieurs années j’ai mes habitudes dans ce pub Irlandais. Pas en tant que cliente, non comme serveuse. Eh oui depuis que ma mère était tombée malade je m’étais fait embaucher ici et bossais donc là durant une partie de mes vacances mais aussi certains soirs et week-ends en parallèle de mes études. Alors autant dire que les clients réguliers ont l’habitude de voir ma bouille et que je connais les lieux sur le bout des doigts. Heureusement en règle générale il y a une bonne ambiance et je n’ai pas à me plaindre de mon patron qui est plutôt sympa. Jamais je ne le remercierai assez de m’avoir permis de travailler ici depuis plusieurs années. Sans ce job je n’aurais guère pu subvenir aux besoins de ma mère et aux miens. Tout comme je n’aurais pas pu continuer mes études non plus. Chose que je ne prenais pas à la légère puisque j’avais fait la promesse à ma mère de ne pas les lâcher tant que je n’aurai pas atteint mon but. D’ailleurs j’avais encore plusieurs années d’études avant de devenir oncologue. Donc autant dire qu’il ne fallait pas que je me relâche de ce côté-là. Les études de médecine sont loin d’être courtes et faciles mais je tiens le bon bout. Une chance que je ne sois pas idiote et que je sois acharnée quand il s’agit d’étudier. Sans ça j’aurais pu lâcher l’affaire depuis longtemps...

Ce soir ne fait pas exception, je suis une fois de plus de service au Finn McCool's où je ne manque pas de travail puisqu’un match est diffusé au sein du pub. Autant dire qu’il y a pas mal de clients et que donc je ne vais pas chômer, loin de là. Au moins ça me permet de ne pas trop ruminer sur mon sort même si ce n’est guère facile d’avancer sans ma mère... Elle a toujours été un réel pilier pour moi, d’un soutien indéfectible et ce malgré ses années de maladie. Tout en nettoyant les tables dès que les clients partaient je ne pus m’empêcher d’avoir une petite pensée triste pour ma défunte mère en touchant le collier que j’ai autour du cou que je ne quitte plus depuis sa mort. À l’intérieur du pendentif est gravé le portrait de ma mère. Je suis allée le faire faire à la bijouterie le jour de son décès afin qu’elle soit toujours avec moi, même si ce n’est plus le cas physiquement.

Les heures s’enchaînent et j’alterne entre le nettoyage des tables et le service en salle. Par moments lorsqu’il y a trop de commandes mon patron me file un coup de main même s’il préfère rester derrière le bar afin de servir les clients au comptoir tout en matant le match de foot. Je me tue à la tâche sans broncher. Après tout c’est ce qui me permet encore de vivre. Sans ça je serais sans doute à la rue à l’heure actuelle. Comme depuis quelques temps j’arbore la plupart du temps un sourire de façade. En même temps je suis obligée de sourire face aux clients même si le coeur n’y est pas vraiment puisque ce n’est pas la joie pour moi. Pourtant d’ordinaire je souris assez facilement et je suis joyeuse, mais il me faudra sans doute encore du temps avant de remonter la pente. Surtout que je traverse cette mauvaise passe seule. Non vraiment heureusement qu’il y a le travail et mes études sans ça je serais probablement cloitrée chez moi à pleurer dans mon lit...

Le pub commençait à se vider et pourtant un client se montrait récalcitrant et voulait un dernier verre. « Monsieur, je vous ai déjà dit qu’on va bientôt fermer et que je n’ai plus le droit de vous servir... »  Avais-je dit assez poliment non sans soupirer discrètement. J’essayais de garder mon calme légendaire même si là clairement ce client commençait à m’agacer. Pourtant j’avais l’habitude avec lui. Ce type n’était qu’un vieux poivrot qui passait son temps à picoler et rechignait toujours à quitter le pub. Afin de ne pas laisser mes nerfs prendre le dessus je fis mine d’ignorer cet homme tout en continuant à astiquer les tables. *Bon sang ce que les clients peuvent être des porcs quand ils s’y mettent. Incapables de boire ou manger correctement...* Je fus tirée de mes pensées par la voix d’un autre homme que je n’avais pas remarqué, bien trop concentrée sur ma tâche. Je croisais enfin son regard et reconnus l’un des profs de l’université où j’étudie, je lui fis un petit sourire sincère en guise de remerciement pour son intervention. Quelques instants plus tard mon patron fit son apparition et escorta le client jusqu’à la sortie. Le pauvre il faisait ça tous les soirs ou presque avec ce type. Un nouveau soupir franchit mes lèvres tandis que je me dépêchais de continuer à nettoyer la terrasse. Je ne tenais pas à rester ici pendant encore des heures, j’étais bien trop fatiguée et j’avais hâte de rejoindre mon lit. Je relevais la tête afin de regarder mon interlocuteur et fronçais les sourcils, me demandant comment il connaissait mon nom avant de me souvenir qu’il était inscrit sur le badge situé sur mon uniforme. « Oh euh... Oui oui ça va... »  Dis-je d’un ton quelque peu hésitant tout en frottant nerveusement ma nuque. Non pas que le comportement du client m’ait chamboulée plus que ça. Juste que je n’étais pas habituée à ce qu’un autre client me demande comment j’allais. La voix de mon patron s’éleva, il me faisait savoir qu’il s’en allait et me laissait donc gérer la fermeture. Ça aussi j’en avais l’habitude...  

Les tables de la terrasse nettoyées, je me dirigeais donc en salle afin de nettoyer le comptoir comme on venait de me demander de le faire. En voyant le chantier sur celui-ci je ne pus réprimer un soupir. J’allais avoir besoin d’huile de coude pour le coup. Je dégageais une mèche rebelle de mon front et déposais mon matériel de nettoyage de l’autre côté du comptoir. De nouveau l’unique client qui était encore présent m’adressa la parole et me surprit. « C’est gentil mais c’est mon travail vous savez... »  Gentiment je déclinais son offre dans un premier temps, trop gênée pour dire oui bien qu’à y réfléchir j’aurais vraiment besoin d’un coup de main. « Je... C’est d’accord mais à la seule condition que je vous offre une bière en échange. »  Finis-je par dire le sourire aux lèvres. J’attrapais le torchon à vaisselle qui traînait dans l’évier et le trempais dans ma bassine afin qu’il soit imbibé de produit nettoyant puis le tendais maladroitement au gentil client. « Merci beaucoup... »  Dis-je m’interrompant un instant avant de reprendre. « Pour le coup de main et pour tout à l’heure... » Je faisais allusion au fait qu’il avait pris ma défense quand le poivrot de service s’était énervé contre moi. Peu de personnes prenaient la peine d’agir comme l’homme qui était à mes côtés présentement. En effet la plupart du temps ils se contentaient de me laisser me débrouiller lorsque je me retrouvais en fâcheuse posture face à un client mécontent. Quant au ménage, je n’y pensais même pas...  

Chris & Lexi  

Pando

code by Silver Lungs

Soir de match était synonyme de beaucoup de boulot pour moi. En effet en règle générale le bar se retrouvait en piteux état en fin de soirée et évidemment c’était à moi de nettoyer le bazar mis par les clients. Mais bon je n’allais pas me plaindre puisque ce boulot me permettait de continuer à vivre dans l’appartement que je partageais par le passé avec ma défunte mère. Même si c’était dur de rentrer le soir et de ne plus la trouver là. Mais il faudrait bien que je m’y fasse un jour ou l’autre… Surtout que pour le moment j'affrontais ça seule puisque je n’avais pas encore eu le courage de faire face à mon père même si j’avais fini par retrouver sa trace grâce aux réseaux sociaux. En effet j’avais partagé la photo retrouvée dans les affaires de ma mère. Mon annonce avait eu pas mal de partages et j’avais eu des messages d’une personne qui connaissait visiblement mon père. Grâce à elle j’avais pu avoir son adresse. Je m’étais rendue une fois devant chez lui il y a peu mais n’avais pas encore passé le cap d’aller frapper à sa porte pour me présenter. Après tout c’était délicat quand même… Il fallait que je réfléchisse à quoi lui dire, même si j’imaginais le choc qu’il aurait en me voyant et en apprenant que je suis sa fille.

Mon patron comme bien souvent avait mis à la porte un homme qui avait toujours du mal à quitter le pub. On avait l’habitude avec lui… Même si je me demandais toujours pour quelles raisons il rechignait à partir. Peut-être qu’il n’a pas une belle vie ? Peut-être même qu’il n’a pas de maison ? Mon cerveau commençait à se poser trop de questions… Il fallait vraiment que j’apprenne à moins réfléchir à propos de tout et n’importe quoi, je me faisais plus de mal qu’autre chose en agissant de la sorte. Quelques minutes plus tard Paris avait quitté le pub, me laissant finir de nettoyer et faire la fermeture. Je me retrouvais donc seule avec un client qui était intervenu un peu plus tôt pour prendre ma défense. Même si je ne le connaissais pas vraiment, je l’avais reconnu puisqu’il est prof dans l’université où j’étudie. Cependant je serais bien incapable de vous donner son nom et de vous dire ce qu’il y enseigne. Je fus un peu saisie qu’il me propose de l’aide afin de remettre de l’ordre dans le bar. Du coup j’avais refusé poliment son offre avant de me raviser. En effet j’étais fatiguée et j’avais l’impression d’avoir encore une montagne de boulot sur les bras. Donc oui, j’avais finalement accepté, non sans proposer quelque chose en échange. Après tout je me sentais déjà assez mal de me faire aider par un client alors que c’était mon travail et que je devrais le faire seule. Je ne pus que sourire lorsque l’homme face à moi accepta ma proposition. Je lui préparais donc un chiffon imbibé de produit que je lui tendais afin qu’il puisse m’aider. Cependant je ne trouvais rien à lui répondre, encore un peu trop gênée. Le sourire aux lèvres j’astiquais donc mon côté du comptoir après avoir enlevé les verres qui s’y trouvaient. Je les avais déposés dans le lave-vaisselle  que j’avais laissé ouvert puisqu’il y en avait d’autres à mettre dedans. Après quelques instants je remerciais gentiment le client pour l’aide apportée. J’écoutais ensuite ce qu’il me disait, continuant tout de même le nettoyage en même temps. “Ah oui ?” Répondis-je quelque peu curieuse en redressant la tête pour pouvoir regarder un instant mon interlocuteur. Devais-je comprendre que lui aussi avait travaillé dans un pub par le passé ? En tout cas c’était la première chose qui me venait à l’esprit. À voir si j’avais raison ou pas. “Oh vous savez j’ai l’habitude ce client se fait toujours virer par mon patron parce qu’il ne veut jamais partir…” Avouais-je sans trop savoir pourquoi je me confiais de la sorte. Pourtant d’ordinaire je suis une personne assez secrète mais bon j’imagine que c’est parce qu’il m’aide que je m’ouvre un peu à lui.

Le nettoyage suit son cours tout doucement tandis que le client me demande si je suis bien étudiante à l’université. J’imagine donc qu’il a reconnu ma bouille pour me poser cette question. “Oui oui il nous arrive de nous croiser parfois dans les couloirs…” Répondis-je aussitôt pour lui faire comprendre qu’il ne se trompait pas de personne. “Je suis en médecine !” Dis-je un petit sourire aux lèvres. Ce professeur était curieux ça ne faisait aucun doute. Sans ça il ne me demanderait pas dans quelle filière je me trouve. “J’attaquerai ma septième année à la rentrée prochaine…” Rajoutais-je histoire de continuer à discuter. Autant qu’on papote tout en nettoyant le bar, c’était nettement plus agréable ainsi que de devoir subir un silence pesant. “Et vous ? Ça fait longtemps que vous travaillez là-bas ?” Osais-je demander afin d’en savoir un peu plus à son sujet puisque parler avec cet homme était loin d’être désagréable. Après avoir fini de nettoyer le comptoir je balayais la salle du regard afin de vérifier que Paris n’ait rien oublié sur les tables. Visiblement non, tant mieux. J’attrapais donc mon matériel de nettoyage et commençais à laver les tables qui en avaient bien besoin. Une fois que ce serait fait, il ne resterait plus qu’à passer un coup de serpillère demain avant l’ouverture. Heureusement pour moi, ce ne serait pas à moi de le faire.    

Chris & Lexi  

Pando

code by Silver Lungs

La journée et surtout la soirée au travail avait été longue, trop longue pour moi. Si bien que j’avais hâte de rentrer chez moi pour me reposer mais malheureusement pour moi je devais continuer à nettoyer le pub avant de le fermer. Tout le monde était parti sauf un client qui n’avait visiblement pas envie de partir. Mais heureusement il n’était pas lourd comme l’homme que mon patron avait viré. Non ce client-là lui me filait même un coup de main. Je trouvais ça très sympathique de sa part mais c’était affreusement gênant pour moi. J’essayais de passer au-dessus de ma gêne puisque je lui avais promis une bière en échange du service qu’il était en train de me rendre. Tout en faisant le ménage nous discutions tranquillement. Ce qui était fort agréable. Sans doute bien mieux que de nettoyer le bar chacun de notre côté sans rien dire. Je hochais la tête aux dires du professeur de l’université. “Moui c’est vrai que pour la plupart on bosse à côté de nos études…” Admis-je bien volontiers. Bien heureux étaient ceux qui n’avaient pas besoin de travailler en parallèle. Ces étudiants-là ne seraient sans doute même pas compte de la chance qu’ils avaient… Pour ma part j’avais beau avoir une partie de mes frais scolaires prise en charge par une bourse, ce n’était pas encore suffisant. Rien que pour le loyer de mon appartement il fallait que je taffe. En continuant à discuter avec l’homme face à moi j’ai pu donc apprendre avec certitude qu’il avait bossé lui aussi dans un bar et qu’il avait connu les mêmes déconvenues que moi. Après tout ça devait être courant de tomber sur ce genre de personnage. Pourtant j’avais toujours autant de mal à m’y faire quand il refusait de quitter les lieux. “Et jamais tu n’as su pourquoi ?” Demandais-je comme pour essayer de me rassurer. Certes ce n’était pas le même client mais peut-être que ça pourrait me permettre de comprendre ce qui arrivait à cet homme. Au bout de quelques instants je réalise que je viens de tutoyer l’homme avec lequel je parle depuis tout à l’heure. Je porte ma main à ma bouche avant de mordre ma lèvre et de grimacer. “Pardon je vous ai tutoyé…” Finis-je par dire légèrement honteuse puisque je n’ai pas vraiment le droit d’avoir de telles familiarités avec les clients.

Je soupirais en voyant que j’avais encore pas mal de taf sur les bras. Néanmoins je ne me ménageais pas et continuais donc à travailler. Je relevais la tête pour observer mon interlocuteur et fronçais les sourcils. “Hum non pas encore… J’ai juste pris un ou deux cours pour voir en quoi ça consiste vraiment…” En effet récemment j’avais vu Mademoiselle Lang et m’étais donc initiée aux arts dramatiques. J’avais beaucoup aimé le peu que j’avais pu voir grâce à elle. Au point que juste après je m’étais inscrite pour suivre ces cours l’an prochain. J’avais rêvé ou le client venait de me faire un compliment ? Moi talentueuse ? Je fis une petite moue en pensant à ceci. Vraiment Mademoiselle Lang aurait dit ça à mon sujet ? Il confondait peut-être avec une autre élève. Sûrement même ! Puisqu’on parlait de l’université, j’avais annoncé au professeur que je suivais des études de médecine. Il avait l’air surpris que ce soit le cas. Avais-je l’air si idiote que ça ? Néanmoins je ne pus m’empêcher de faire un joli sourire lorsqu’il me félicita. “Merci…” Bredouillais-je timidement avant de dire. “Ça va se faire dans les prochains jours oui…” J’avais déjà hâte de pouvoir choisir ma spécialité en espérant que je serai acceptée en oncologie. Je croisais vraiment les doigts pour que ce soit le cas. Parce que sinon je ne saurais pas du tout vers quelle autre spécialité me tourner puisque j’étais focalisée sur celle-ci depuis plusieurs années maintenant…

Après le comptoir je m’attaquais au nettoyage des tables tout en continuant à papoter avec cet homme charmant. Parce que oui on avait tout de même une conversation agréable et ça me faisait du bien. Ça me permettait d’oublier au moins un temps mes problèmes… Je fis une petite grimace en apprenant que le rêve de mon interlocuteur n’avait pas pu se réaliser et qu’il avait donc dû changer de projet de carrière. “Oh je suis désolée que vous n’ayez pas réussi à réaliser votre rêve…” Le pauvre… J’espérais néanmoins que sa reconversion ne le pesait pas trop. “Et du coup ce n’est pas trop dur d’être devenu prof ?” Demandais-je curieuse de savoir si ce métier lui plaisait au moins un peu. “Vous êtes originaire d’ici ?” Ne pus-je m’empêcher de demander. Si je continuais ainsi, il allait penser que j’étais bien curieuse. Et pour le coup il aurait totalement raison… Pourtant d’ordinaire je ne suis pas comme ça. Enfin pas autant avec les gens que je ne connais pas… Mais je ne sais pas pourquoi avec lui le dialogue semble plus naturel. À tel point que je pourrais me laisser aller à une ou deux confessions. D’ailleurs sans m’en rendre vraiment compte je lui dis. “Pour ma part depuis plusieurs années je sais ce que j’aimerais faire après mes études, devenir oncologue…” Je me tus un petit instant avant d’ajouter. “Pour aider les malades à mieux vivre avec leur cancer et même mieux, les guérir !” Oui c’était mon but dans la vie. Certes à l’origine j’avais voulu embrasser cette carrière pour pouvoir sauver ma mère mais malheureusement je ne pourrai jamais le faire puisqu’elle n’est plus de ce monde. Néanmoins j’aimerais vraiment aider les gens à combattre leur maladie… Et j’espère que de là-haut ma mère sera toujours aussi fière de moi si je parviens à devenir oncologue un jour.  

Chris & Lexi  

Pando

code by Silver Lungs

D’ordinaire je ne m’ouvre pas vraiment facilement aux autres. Pourtant là j’arrive à discuter avec ce client qui si je ne me trompe pas n’était jamais venu ici auparavant. Je ne sais pas pourquoi mais je prends plaisir à papoter avec lui même si nous discutons des potentiels problèmes que les clients peuvent rencontrer dans leur vie. Je dois bien avouer que ce que me dit celui qui est en train de m’aider rejoint assez ce que j’imagine quand je vois un homme qui s’alcoolise fortement et refuse toujours de quitter le pub. Je ne peux m’empêcher de grimacer légèrement en songeant au fait qu’il doit probablement avoir un des problèmes énumérés par le professeur de l’université. « J’avoue que les clients ne se confient pas forcément à moi... Même si on a pas mal d’habitués ici. Mais ça fait toujours froid dans le dos quand j’imagine ce que certains peuvent traverser... » Peut-être qu’on ne me parle pas vraiment parce que je suis une personne assez introvertie et plutôt méfiante. Je me dis qu’il faudrait peut-être que je m’ouvre un peu plus aux autres. Qui sait peut-être qu’ainsi les clients pourraient me confier leurs soucis et se sentir mieux après ? Je n’en sais trop rien mais si tel était le cas, j’en serais ravie. Me sentant assez à l’aise en compagnie de cet homme, je l’avais tutoyé alors que dans mon job ce n’est pas vraiment accepté. En me rendant compte de ma boulette, je m’étais excusée aussitôt. Je fronçais légèrement les sourcils en voyant que le client faisait allusion à son job à l’université. « Non mais je ne pensais même pas à ça en vrai. » Répondis-je en laissant s’échapper un petit rire avant de reprendre la parole. « Je parlais de mon travail ici et du fait que je n’ai pas à tutoyer les clients. Sauf avec les habitués et encore... » Parce que oui il fallait être sûr d’abord qu’ils soient d’accord avec ça. Il ne manquerait plus qu’ils se plaignent à mon patron parce que j’aurais trop pris mes aises avec eux.

Je ne m’arrêtais pas une seule seconde afin de terminer au plus vite mon travail. Mais c’était sans compter sur le sympathique client qui me força à m’assoir sur un tabouret. Je fis une petite moue avant de me lever. « Très bien dans ce cas on boit un verre maintenant pendant ma pause. » Le sourire aux lèvres je me dirigeais jusqu’au comptoir où je servis une pression bien fraîche à Chris. Pour ma part je pris un soda bien riche en sucre. Après tout si j’étais aussi blanche que le disait le professeur, je devais être en manque de glucides. Je tendis sa bière à Christopher puis m’installais sur le tabouret et bus une première gorgée de ma boisson. Il n’y avait pas à dire ça faisait un bien fou de se poser un peu et de siroter quelque chose de frais. Étant posés nous papotâmes cette fois au sujet des arts dramatiques. « Oui je me suis inscrite pour débuter à la rentrée ! » Répondis-je de manière enjouée. En effet j’avais adoré l’initiation reçue par la collègue de Christopher. « Je pense que ça va beaucoup m’aider pour m’ouvrir un peu plus aux autres... » Enfin j’espérais parce que souvent je ressentais un profond mal-être qui m’handicapait beaucoup dans mes relations sociales. « Oui ça fait plusieurs années que j’ai ma petite idée... » Déclarais-je sans en dire plus pour le moment. Peut-être pas encore prête à m’ouvrir au point d’aborder la raison pour laquelle je souhaitais embrasser la carrière d’oncologue.

Ce fut au tour de mon collègue d’un soir de me parler de son passé et du rêve qu’il n’avait pu réaliser. C’était triste tout de même de voir ses espoirs s’effondrer. Je l’écoutais attentivement tout en hochant la tête et en buvant un peu de ma boisson. « C’est déjà ça même si je me doute bien que vous auriez préféré pouvoir vivre en tant qu’acteur. » Dis-je en faisant un petit sourire. Mais il fallait bien avouer que Chris avait raison, tout le monde ne pouvait pas devenir acteur ni même avoir la même carrière que certains. Cependant il avait l’air de bien prendre le fait d’être devenu professeur d’arts dramatiques donc ça allait, tant mieux pour lui. D’autres à sa place se seraient sûrement laissés aller face à leur échec. « C’est vrai. »  Répondis-je doucement, approuvant les dires du professeur. « Vous le vivez bien et c’est probablement mieux ainsi. » Dis-je marquant une petite pause avant de rire doucement. « Oh je ne compte pas faire carrière là-dedans et puis je n’ai pas la prétention de me voir devenir une grande actrice non plus ! » Manque de confiance en moi bonsoir. Mais je disais vrai quand même puisque moi je ne rêvais pas de cette vie-là personnellement. Non pour moi l’acting sera juste une passion comme une autre, ce qui est déjà pas si mal en fait.

Désireuse d’en savoir plus au sujet de mon interlocuteur que je trouvais fort sympathique, je le questionnais au sujet de ses origines. En effet je me demandais s’il était d’ici ou s’il venait d’ailleurs. J’appris donc qu’il était Texan. « Oh ! » Dis-je quelque peu surprise. En effet je ne m’étais pas imaginé une seule seconde ce genre de chose à son sujet. « Je ne sais pas pourquoi mais je pensais que vous étiez du coin... » Avouais-je entre deux gorgées de soda à la cerise. « Les armes... » Dis-je sur un ton qui en disait long sur le fait que je ne les appréciais pas. Le monde ne s’en porterait que mieux si elles étaient interdites partout. Bien que des gens mal intentionnés trouveraient toujours le moyen de contourner les lois. Ce fut à mon tour de parler un peu du métier que je souhaite faire après mes études. En espérant d’ailleurs que je réussisse celles-ci et que je sois acceptée dans la spécialité qui me branche. Même si j’avais expliqué un peu pourquoi je souhaitais devenir oncologue, je n’avais pas fait allusion au fait que j’avais perdu ma mère des suites de plusieurs cancers et d’une longue lutte acharnée qu’elle n’avait malheureusement pas remportée. Je ne savais pas si j’étais prête à en parler. Ni même si je serais capable de le faire sans me mettre à pleurer tellement la perte de ma mère était encore récente. « Je ne sais pas non plus si un jour on sera capables d’en faire plus que présentement mais je l’espère sincèrement. » Dis-je en faisant un petit sourire. Et même si la science n’avançait pas à ce sujet, j’avais envie d’aider les cancéreux du mieux que je le pouvais. Je me mordis l’intérieur de la joue intentionnellement pour m’empêcher de craquer alors que je pensais à ma défunte mère. Je ne voulais pas me mettre à pleurer à chaudes larmes en public, encore moins face à un parfait inconnu. J’avalais donc d’une traite le reste de mon verre. « Bon allez il faut que je me remette au travail ! » Dis-je, me levant, détournant légèrement la tête afin que Chris ne remarque pas le fait que j’avais les larmes aux yeux. J’attrapais ma bouteille de soda et m’en allais aussitôt la jeter dans le bac de tri avant de continuer à nettoyer les tables.

   

Chris & Lexi  

Pando

code by Silver Lungs