TG ✜ Bal du Nouvel An.

Il y avait déjà pas mal de monde quand j’arrivais au City Park afin d’assister au bal du nouvel an. Je m’étais laissé convaincre par mon ex-femme que ce serait bien que je me mêle un peu à la foule, que je me cherche plus qu’une compagnie d’un soir. Elle avait raison, la solitude n’était pas une bonne solution mais je n’arrivais pas vraiment à m’en convaincre complètement. Après tout, mes problèmes personnels n’allaient pas disparaitre du jour au lendemain parce qu’une femme partageait ma vie. Au contraire. J’étais sans le sou, je bossais comme un dingue pour joindre les deux bouts et je n’y arrivais même pas surtout en ce moment. Ma blessure à la jambe m’empêchait de bosser bien que j’avais abandonné les béquilles depuis quelques jours pour marcher avec une canne. Je sondais les environs, en quête de têtes connues mais je ne vis rien. Je me fis donc une raison pour avancer parmi la foule histoire de trouver un coin stratégique pour observer tout ce monde. Il y avait des couples qui dansaient sur la piste, d’autres qui discutaient simplement autour d’un verre. L’ambiance était agréable et je me surpris à être détendue même si je portais un costume qui me donnait l’impression d’être un pingouin. Le problème, c’est que ma garde-robe n’était pas réellement fournie de ce côté-là et je possédais en tout et pour tout : deux costumes. Un militaire, l’autre civil. Je ne pouvais décemment pas mettre le premier à cet événement donc je m’étais rabattu sur le second. Un serveur passa près de moi et j’attrapais une flute de champagne pour me donner une certaine constance. J’allais devoir limiter ma consommation ce soir si je ne voulais pas rouler sous une table. J’allais me diriger vers le buffet quand j’entrais en collision avec une autre personne. Mon premier réflexe fut d’écarter mon verre pour épargner à la malheureuse, une douche au champagne. « Désolé ! Rien de cassé ? » demandais-je aussitôt en portant mon regard sur ma pauvre victime.

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Je n’avais pas pu résister à la tentation de venir à ce bal malgré que ma mère et mon oncle avaient essayé de m’en dissuader. Ce n’était pas comme si j’avais l’habitude d’obéir n’est-ce pas ? Et puis il n’y avait rien de mal à se mêler un peu aux habitants de la Nouvelle-Orléans. Je n’avais rien contre le fait de me faire de nouveaux amis et puis avec un peu de chances, nous allions rester un peu plus longtemps dans cette ville. Je n’avais par contre, fait aucun effort pour m’habiller. Je n’avais pas de costume qui fassent réellement bon chic, bon genre mais j’avais opté pour un pantalon noir et une chemise blanche. Mes baskets usées dénotaient un peu mais je m’en fichais. Je voulais danser et faire la fête. Ma sœur jumelle n’avait pas souhaité m’accompagner et je m’en sentais un peu triste car j’avais tellement l’habitude de faire les choses avec elle. Nous étions pour le moins fusionnels mais tant pis : je n’allais pas me gâcher la soirée pour ce petit détail. Je m’incrustais dans la fête, tournant sur moi-même pour essayer de tout voir. Les décorations étaient vraiment travaillées, donnant à cette immense tente, une ambiance magique. C’était vraiment sympa mais je m’attardais pas plus sur le décor car je venais de repérer le buffet. Aussitôt mon ventre cria famine et je me précipitais dessus, me faufilant avec habileté parmi les vieilles dames occupées à se restaurer et cancaner sur les uns et les autres. Tiens, j’ignorais qui était Josiane mais elle prenait cher songeais-je amusé tout en chipant des bâtonnets de carottes et autres légumes.

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Cette foutue jambe blessée mais rendait maladroit et j’avais bien l’intention de balancer cette canne aussi loin que ma force me le permettait à la première occasion. J’avais beau le dire, je ne le ferais pas tout simplement parce que j’étais un ancien militaire bien trop obéissant quand on me donnait un ordre. Mon médecin m’avait ordonné de garder cette canne jusqu’à ma complète rémission même si cela me démangeait de la lui carrer où je pensais. Être inactif me rendait grognon et c’était une raison qui m’avait poussé à me tenir éloigné de mes proches. Je regardais donc la demoiselle que j’avais bousculé : c’était Octavia. Il était étrange de voir qu’en si peu de temps, c’était déjà la deuxième fois que je la voyais à croire que le Destin s’amusait à faire se croiser nos routes. Je n’allais pas m’en plaindre, la demoiselle était agréable à regarder dans sa belle robe pailletée. Je crois bien que la dernière fois que mon ex-femme avait mis une robe, c’était le jour de notre mariage. Tani était bien plus une adepte des tenues fitness qu’autre chose. « Cela aurait été dommage de salir une belle robe » rétorquais-je avec un léger sourire au coin des lèvres. « Je vais bien malgré que j’ignore pourquoi je viens à ce bal. Généralement, on pense à prendre une cavalière mais j’ai sauté cette étape » me plait-il à plaisanter. « Et vous, comment allez-vous ? » lui demandais-je en retour histoire de ne pas passer pour un rustre. Mon regard se détourna d’elle quelques instants, apercevant une gamine que je ne pensais pas revoir de sitôt mais je reportais très vite mon attention sur Octavia. Ce n’était pas plus mal pour ma santé mentale.

J’aimais la musique, la façon dont les notes des instruments pouvaient s’accorder avec la voix d’un chanteur ou d’une chanteuse. Ce bal était l’occasion unique d’être bercé par la musique américaine. Du moins, c’est que je me complaisais à croire. J’étais parfois naïf mais je ne le vivais pas trop mal. Il suffisait de voir le sourire qui ne quittait pas mes lèvres, saluant les gens, laissant trainer une oreille ici et là pour m’habituer à la sonorité de cette langue. Je parlais très bien anglais mais j’étais bien incapable de me départir de mon accent russe, rendant par moment, mes paroles un peu confuses. Ma foi, je trouvais toujours un moyen de me faire comprendre. A quelques mètres de là, je voyais une jeune femme m’observer et je lui dédiais mon plus beau sourire. J’attrapais d’ailleurs trois oranges pour m’approcher d’elle en jonglant. J’aimais bien faire le pitre et quand je voyais quelqu’un un peu en retrait voire triste, je faisais tout mon possible pour le faire rire. Après tout, c’était à ça que servait le cirque de ma famille : distraire les gens, leur apporter un peu de magie dans leur triste vie. « Bonsoir jeune demoiselle » la saluais-je en inclinant mon torse vers elle pour mieux reprendre mon jonglage. « Pourquoi ton cœur n’est pas à la fête ? Tes parents t’ont forcé à venir ? » lui demandais-je avec curiosité. J’étais déterminé à en apprendre plus sur elle. Tant pis, elle allait être la victime du facétieux Lev Zirkov.

Je n’avais pas souhaité prendre une cavalière pour la soirée. Bien souvent, dans ce genre d’événement, on avait tendance à mal interpréter les invitations. Or, je ne voulais pas qu’une femme s’imagine que j’allais me caser avec elle aussi facilement. Ce n’était pas l’envie qui me manquait de retrouver une certaine stabilité sentimentale mais je ne me voilais pas la face. Je n’avais pas grand-chose à apporter à une femme si ce n’est un passé violent dans l’armée, des problèmes d’argent qui me bouffaient mes nerfs et une famille dysfonctionnelle. Et puis, je ne voyais pas plus loin que demain. Je n’arrivais pas à me projeter dans l’avenir et je savais que cela pouvait effrayer certaines femmes. Je ne vivais pas comme un reclus non plus mais les étreintes d’une heure ou deux, ce n’était pas ce qu’il y avait de plus glorifiant à raconter. « J’ai envie de dire, bienvenue au club dans ce cas » rétorquais-je à sa réponse en levant mon verre pour trinquer avec elle. Je me demandais si son célibat avait avoir avec Roan. Il n’était pas évident de tourner la page d’un amour quand ce dernier vous était arraché sans préavis. « Je ne gambade pas encore mais j’ai bon espoir de pouvoir repartir en mer dans quelques jours. J’en ai un peu marre d’être inactif » lui répondis-je avec une petite grimace. Octavia semblait être ravie de me revoir et j’en étais bêtement satisfait. « Je crois qu’on peut se tutoyer non ? par contre, c’est pas que je ne veuille pas te proposer de danser mais je tiens à tes orteils. Je suis un piètre danseur. Je crois que la dernière fois que j’ai dansé, c’était à mon mariage donc on peut dire que ça date » rigolais-je légèrement.